En trois mois, Google a racheté trois start-up fondées par d'anciens collaborateurs. Une pratique qui colle bien à sa stratégie, et qui lui permet de traquer l'innovation là où elle se trouve. Qui seront les prochaines cibles ? Quelques pistes.
Google a racheté cette semaine reMail, un moteur de recherche dans le contenu des emails pour mobile. La start-up avait été créée par un ancien ingénieur de Google. Après Appjet et Aardvark, c'est la troisième start-up fondée par d'anciens salariés que Google reprend en trois mois. Un opportunisme qui se transforme en stratégie ?
Le "spin-in" s'inscrit dans le modèle de Google"Cela s'inscrit totalement dans la logique de Google", analyse Bernard Girard, consultant en management et auteur d'un ouvrage consacré au modèle Google*. "On est dans un univers où il y a énormément d'innovation, et cette innovation coûte très cher. Google a mis en place un dispositif pour innover, qui consiste notamment à réserver 20% du temps de travail des ingénieurs et des développeurs à leurs recherches personnelles. L'autre solution, racheter des entreprises, leur coûte beaucoup moins cher." Avec un autre avantage, ajoute Bernard Girard : en rachetant des start-up fondées par d'anciens salariés, cela encourage ceux qui sont restés.
Ainsi tout le monde est gagnant. On pourrait penser, au contraire, que c'est un constat d'échec pour Google, qui ne parvient pas à faire naître les idées de ses salariés en son sein, et se retrouve obligé de payer pour les récupérer. Ce n'est pas le cas, pour Bernard Girard. "L'entreprise laisse forcément passer des bonnes idées. Mais une des forces de Google, c'est de savoir revenir sur ses erreurs. De plus, ce qui l'intéresse, c'est toute la connaissance qu'elle rachète en même temps que les start-up." Dans tous les cas, Google ne procède pas à ces acquisitions pour acheter de la part de marché ou tuer la concurrence, mais pour ajouter une brique supplémentaire à ses services.
Du côté des anciens salariés, c'est également la bonne pioche. Ils ont eu le temps de préparer leur projet chez Google, y ont pour certains fait fortune, ce qui leur a permis de lancer leur affaire. Leur ancienne entreprise se substitue ensuite aux fonds de capital-risque. Ils prennent ainsi moins de risques, et peuvent se concentrer sur leur produit et leur business.
Cette pratique qui consiste à racheter les entreprises de ses anciens salariés porte un nom, le "spin-in", par opposition au "spin-off" ou essaimage. Elle aurait été popularisée par Cisco. Alors, peut-on s'attendre à d'autres rachats du même type ? En tout cas, il n'y a pas que Google qui s'y intéresse puisque rappelons que Friendfeed, racheté par Facebook, a été fondé par quatre anciens de Google.
Qui sont les prochaines start-up sur la liste ?Sans être devin, on peut déjà pointer du doigt un certain nombre de start-up créées par d'anciens "Googlers", repérées par l'incubateur Gaebler Ventures et le blog Giga OM, vers lesquelles les regards vont se tourner. A suivre tout particulièrement : Felicis Venture, une société fondée par un ancien de Google qui conseille et trouve des investisseurs pour les start-up. Dans son portefeuille figuraient... Appjet et Aardvark. Ainsi que Mixer Labs, racheté par Twitter. A son portfolio on trouve encore le prometteur Tapulous (jeux sociaux pour iPhone).
Cuil: un moteur de recherché qui organise les résultats par thématique et par colonnes, et propose d'élargir la thématique de la recherche à des thèmes connexes.
Dasient: développe des solutions de sécurité contre les logiciels malveillants.
Ooyala: une plateforme de publication, de monétisation et d'analytics pour la vidéo en ligne.
DoApp: une plateforme de création d'applications mobiles, qui propose aussi un réseau de publicité sur mobile.
Imo: messagerie instantanée, chat vidéo et vocal sur Internet, compatible avec tous les grands services de messagerie instantanée (Skype, MSN, Google Talk...).
Red Beacon et Thumbtack : places de marché pour services locaux.
MyLikes: service publicitaire de billets et de tweets sponsorisés.
Chai Labs: contenu et plateforme communautaire pour les éditeurs de sites web.
Brizzly: client Twitter et Facebook.
ChartBeat: web analytics en temps réel.
*Une révolution du management: le modèle Google, MM2 Editions, 2006
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